Réçit d'un vol sur 2 jours entre Naples et Biarritz
Le Tecnam P2002 est un avion biplace pour l’école de début construit en Italie. Depuis deux ans, nous changeons cet avion presque tous les ans (10 mois env.) et il faut donc aller chercher les avions neuf sur le lieu d’assemblage.
Cette année, on m’a gentiment proposé d’y aller avec le vice-président (mon copi préféré dans les anciens récits) : Alexandre.
L’avion est assemblé à coté de Naples : à Capua (LIAU). Un convoyage sur Biarritz n’est pas si difficile que cela, au détail près qu’on est en décembre et en VFR. Pour les pilotes de lignes qui lisent : l’avion n’est ni IFR ni dégivré (c’est une question qui revient souvent).
Pour simplifier le tout, je ne suis pas en France mais en Irlande (à Cork). Le départ est donc prévu la mi-décembre sur le vol EI 822 en direction de Charles de Gaulle. Un joli A320 vert :
A bord c’est la crèche : les enfants courent partout, crient, … Une bonne turbulence bien placée en auraient calmé plus d’un. Dommage, le vol est « smooth ». Arrivée au terminal 1 (ca faisait un bail que je n’y étais pas allé).
Puis premier obstacle au convoyage. Je reviens de 2 mois de « voyage » et j’ai donc un bagage de 21 kg que je ne peux pas prendre dans le Tecnam. Solution ? La Poste. Il y a un bureau à CDG mais déjà faut le trouver (entre le T2 A et C). Puis ensuite ils n’acceptent pas les bagages non filmés. Donc faut trouver le « filmeur ». Bref, au bout d’une heure trente le bagage est envoyé. Au passage, 22 € pour les 23,1 kg contre 160 € pour DHL ou Fedex au départ de Cork … La Poste, on a tous à y gagner …
Le vol sur Naples est prévu demain matin (par AF !). Entre temps, j’ai le temps d’aller voir ma sœur dans Paris puis retour sur CdG où Alex me rejoint, on va à l’hôtel et on regarde un peu la nav (mais juste à peine). Ce que l’on regarde vraiment c’est la météo et l’heure du couché de soleil. Et oui car bien qu’habilité vol de nuit l’avion ne l’est pas. Donc c’est CS + 30 min (couché de soleil + 30 min) après faut être posé.
L’avion doit décoller à 9h35 demain matin pour arriver à 11h50. Étant jeune et donc utopique, nous nous disons que le lendemain soir on pourrait être en Corse. Figari ou peut être même Calvi (ou l'on a un pied à terre, Acapulco…) La météo n’est pas très encourageante, mais ca pourrait passer. On s’endort sur cette idée.
Lendemain matin, y’a des RVR à CdG et donc des créneaux et donc du retard. Notre vol c’est une heure de retard… La Corse le soir ca devient chaud … Embarquement par bus, puis on attend 15 min dans l’avion avant d’être autorisé… L’A318 n’est pas si plein que cela, et on est entre deux zones (business et tempo) mais en classe Y… Roulage, on est n°6 au point d’arrêt et on voit 7 balises espacé de 60 m chacune … MAN FLEX 54 RWY ATHR BLEU, c’est partit … (bon pour le Flex on en sait rien car on n’était pas devant …).
Quelques secondes plus tard le soleil est la !
Le copieux petit dej arrive ! Puis, notre demande de visite de poste est acceptée. On se retrouve dans le plus beau bureau du monde. Discussion de notre périple (et oui, l’avion n’est ni dégivré ni IFR …). On repart en cabine mais on doit faire la descente et l’approche dans le poste.
J’en profite pour lire le nouveau tome de XIII (La Mangouste) et le TOD arrive. On re-rentre dans le cockpit.
L’approche sur Naples est de CAT B, c'est-à-dire qu’il faut une reconnaissance avant à cause entre autre des cailloux. Y’a des gros-nimbus un peu partout et l’approche défile à une vitesse hallucinante. C’est l’ILS Victor et on se croirait en école IFR : virage de procédure et tout le reste, le tout au milieu des cailloux. On sort de la couche et on voit qu’en effet faut pas se planter (ca rappelle Annecy). 1000ft RA stabilisé ! On arrive à la MDA (assez haute car devant ca monte !). Avec 35 kts de travers le touché est franc !
Roulage rapide et bienvenue en Italie : il fait chaud (17 °C). On essaye de tous nous entasser dans un bus, mais les deux derniers passagers ne peuvent pas rentrer. Ca rappelle la RATP … Pour gagner du temps, on avait rien enregistré comme bagage et ô miracle, le taxi commandé est la. Direction Capua. On commence à reprendre espoir pour dormir en Corse ce soir. On arrive à l’usine (heureusement que les italiens conduisent vite). On a 1h30 pour tout voir et décoller…
A l’arrivée, tout le monde mange, et on est mis en salle de réunion pour attendre … Bon et bien on dormira à Capua cette nuit… Après 45 min d’attente, l’importateur et un employé de Tecnam arrive et on commence. On rentre dans le hall d’assemblage : des ULM, des avions et même pas mal de P2006T (le bi-moteur aile haute). Notre avion est dehors : le F-HCSK !
Prévol minutieuse et Alex part pour un vol « de réception » avec un des pilote d’essai. Le terrain a l’air assez « chaud ». Le taxiway n’est pas plus large que la voie de train et comme il a plu, il parait que tout est marécageux …
Pendant ce temps la on discute de l’actualité … Apex, Thielert, … Les sujets ne manquent pas.
Retour de l’avion avec ses pilotes et tout est OK. On part vérifier les papiers : manuels de vol, EASA Form One de quelques pièces, livrets moteurs et hélices, …
Puis on rentre à l’hôtel… Le départ est donc prévu demain matin avec une étape à Toulouse ou Montpellier. Ne connaissant pas trop l'avion, on se documente (c'est pour rire bien sur …).
Le lendemain matin, on prend la météo à l’hôtel et Toulouse semble pas jouable, par contre Montpellier ca passe. On prend un taxi pour revenir à l’usine. On se fait arnaquer (on est en Italie …) mais on arrive à bon port et à l’heure (08h30 LT). On imprime la météo : quelques plafonds bas au départ, des CB ISOL dans le golfe de Gêne mais à part ca « il fait beau ». On arrive à l’avion et la c’est le « drââââââme » : y’a un petit choc sur un bord d’attaque.
Le temps de réparer ca ne sera pas un décollage avant 13h00. On oublie donc Montpellier. On regarde plus à l’est et y’a Cannes. Mais Cannes, ca rime avec taxes chères… Téléphone au terrain et c’est juste moins de 30 € pour l’atterrissage et une nuit de parking. L’hôtel est sur le terrain, donc on va pour Cannes avec refuelling à Pise. A midi l’avion est prêt (cool !). Là ca semble partit.
On s’installe dans l’avion, mise en route, chauffage … Roulage (allez voir la vidéo pour vous rendre compte du « taxiway ») puis décollage. Je pense qu’on a décollé de la piste mais c’est vraiment plus un champ inondé qu’une piste d’aviation…
On est avec Grazzanise. En Italie presque tout l’espace aérien est géré par les militaires et à l’heure de repas ca mets du temps à répondre… On essaye sur deux fréquences différentes et ce n’est qu’au bout de 3 min qu’on a eu quelqu’un… Enfin, on est direct sur TEA à 1500 ft. Problème, le sol monte et moi j’ai un petit problème de lecture de carte … Car j’ai cru que la classe A de Naples descendait jusqu'à 1500 ft AMSL et c’était de l’AGL. Comme quoi changer de fabriquant de cartes …
Après TEA on passe avec Roma Information… On a du mal à les contacter, et oui c’est comme en Espagne : y’a de la classe A partout, les VFR sont donc « plaqués » au sol et avec les montagnes dur de les avoir en VHF… En se rapprochant de Rome on arrive à avoir un contact bilatéral.
Petite surprise : “F-HCSK, you’re not authorized to land at Pisa, you need a PPR. Are you able to call Pisa by phone ?”.
Oupsss c’est vrai qu’on est partit vite mais on aurait loupé cela… Après quelques infos avec Roma Info, on apprend en fait il n’y a pas de 100 LL à Pisa. Et oui, on avait les NOTAM mais on n’avait pas lu les 40 pages (en fait même pas imprimés…) mais je les aie sur l’iPhone. Je regarde et en effet c’était inscrit. Pour le moment on continue et comme on a déjà posé le plan de vol Pise – Cannes on ferra un bilan carbu pour continuer direct sur Cannes sans stop.
On poursuit la nav (qui est assez simple) dans la vallée. On passe à l’est de Rome. Pas grand monde en l’air, pourtant maintenant c’est presque grand beau. On passe ensuite avec Frosinone ou y’a personne. Pourtant il devrait y avoir du monde … On évite donc la zone.
On repasse ensuite avec Roma Info en direct Bolsena. La température commence à diminuer et comme on n’a pas pris de pastille de détection du monoxyde de carbone on ne met pas le chauffage… Le lac est magnifique et il est temps d’aller chercher la mer.
On contact ensuite Grosseto qui ne nous donnes pas la direct car y’aurai un IFR de prévu dans une procédure. En Italie c’est comme en Espagne, on tire la couverture au max. D’ailleurs on n’a jamais vu cet IFR.
On arrive sur la cote, autant dire que la nav qui n’était pas dur, est encore moins dur. Je fais un deuxième bilan carbu : Cannes est atteignable avec les réserves réglementaires (et même bien plus). On prévoit au mois 40 min d’autonomie à destination.
On poursuit vers le nord et on voit au loin quelques iles (ainsi que l’ile d’Elbe). On était la il y a 6 mois…
Il est temps de passer avec Pise. Y’a (enfin) du monde sur la fréquence. Normal on est avec Pise APP. Ils nous donnent un direct Genoa. Par contre y’a des gros-nimbus dans le coin. Après réflexion digne d’un débat on poursuit le long de la cote. On descend donc 1000 ft sur le cheminement.
Une fois les gros nuages passés, on redemande la direct GEN qui est approuvée. On monte un peu, et l’APP nous donne un cap. Et oui, y’a de la zone P et D impénétrable… Bien vu ! Le cap nous rapproche d’un CB donc on passe en limite des zones mais suffisamment loin du cunimb.
On est transféré à l’APP de Gêne. On négocie facilement une directe Albenga. On traverse donc à 30 nm au sud de Gêne à 2000 ft. Il commence à faire froid et le soleil commence à tomber. On est enfin sur un cap ouest qui nous rapproche de la maison (Biarritz).
On fait un dernier bilan carbu et on prévoit à présent 1h de réserve. Ca fait un peu plus de 3h qu’on est en l’air …
A Albenga, on est transféré avec Nice (on est encore à 30 nm de la frontière). We speak french now ! Le temps sur les Alpes n’est pas vraiment propice au vol à vue… Mais nous on poursuit sur le trait de côte vers Cannes. On croise Monaco (ce n’est vraiment pas beau !).
Ensuite c’est la vent arrière main gauche 17 et on est n°4. Vent arrière, base, finale et on touche après 4h « air-born », soit 4h10 de vol…
On refait l’essence (78 litres donc avec plus d’une heure de réserve) et on part se parker dans l’herbe. Prochaine fois on viendra en 7X, on serra garé en face du terminal. On paye les taxes le soir même car on prévoit de repartir tôt le lendemain et on va à l’hôtel à pied. C’est à 3 min de marche !
Repas puis on s’endort rapidement car ca crève un peu tout ca et le vol du lendemain s’annonce aussi long que celui d’aujourd’hui.
Lever aux aurores pour être prêt le plus tôt possible. On prend la météo à Cannes (et la faut avouer que c’est bien foutu !) et ca ne sera pas de tout repos. Les SIGMET annoncent SEV TURB BLW FL80 dans la FIR de Marseille. Pour le moment Carcassonne et Blagnac sont quasi IMC mais cela devrait s’améliorer. On part donc avec l’idée de traverser le PACA au FL85 puis de descendre ensuite et si ca se bâche trop, on pose à Montpellier. Mais avant je dépose un prévis de vol auprès du BRIA de Nice.
On passe le PIF (vu la largeur de la machine à rayon-x certaines personnes doivent prendre de gros colis) et on marche jusqu'à l’avion. Ca a bien condensé et l’avion est trempé à l’intérieur. Je sacrifie un tee-shirt Air Total pour pouvoir essuyer l’intérieur. Prévol et mise en route puis longue attente avant que ca chauffe. On demande à Cannes Sol un transit au FL85. Je suis assez sceptique quand à la finalité mais qui n’essaye pas n’obtient pas. Petite confusion de la part de l’ATC (avec un autre avion qui a son plan de vol annulé à destination de LSZH …).
Après un bon quart d’heure de chauffe moteur on roule vers le point d’arrêt 17. On a déjà 2500 ft sur WC la suite sera à négocier avec Nice APP. Juste au moment de commencer le roulage, le trim se trouve en position plein à cabrer … Ennuyeux… Et au point d’arrêt, juste avant de s’aligner, il s’y retrouve une deuxième fois … Déroulement de trim ou bien appuis involontaire ? L’avion étant certifié pour voler avec un trim plein à cabrer ou à piquer, je décide de partir et que si en l’air cela se reproduit on revient se poser. Décollage en majorant un peu la vitesse (car si le trim venait à se cabrer à la rotation cela pourrait devenir un peu gênant …). Mais il n’en n’est rien, on décolle, passe la côte et suis l’autoroute jusqu'à WC.
On obtient 3500 ft puis le FL65 et enfin le 85 avec un cap à maintenir au début. Vive la classe C ! Je n’y croyais pas mais on est bien clairé au FL85.
Le vol est assez simple dans le PACA. Les zones de Salon sont fermées, et on passe d’APP à APP. On est sur une directe Fréjorgues (Montpellier), peu de turbulence. On a quand même eu un rabattant qui nous a demandé une modification d’altitude…
On réactualise la météo avec Montpellier APP. METAR de Carcassonne et Toulouse. Ce n’est pas joli devant … A Carcassonne il y a du vent (dans les 16 kts) avec un BKN009 et à Toulouse cela s’est bien levé. Il subsiste un FEW008 et BKN015.
Au vu de cette situation et sans suffisamment bien connaitre la météo d’après Toulouse, on décide de passer sous les nuages. On descend donc et ca commence à turbuler … A turbuler même très fort…
Un TB20 qui allait sur Carcassonne nous double (les avions aux couleurs du SEFA sont bien visible et c’est appréciable !). D’après eux ca turbule moins, mais faut dire qu’on est au moins 2 fois plus légers qu’eux. En entrée de la CTR de Carcassonne, nous avons une vitesse sol de 60 kts (on peut parler de contre record …). Il y a donc une composante de face de 40 kts. Et on est entre 500 et 700 ft sol (et oui au dessus y’a des nuages). En plus il fait froid et on ne mets pas de chauffage … La vallée de l’Aude n’est pas facile à passer … Pas beaucoup de photos car on avait mieux à faire.
Après 45 min de machine à laver, ca se calme et on arrive vers Toulouse. On négocie un transit sud en diagonale (SL – TW) et on passe donc avec Francazal. Pas grand monde en vol vers Toulouse, et à nos altitudes on ne risque pas gêner les IFR. Il y a toutefois un hélicoptère en recherche de malfaiteur vers Muret. On demande les METAR de devant et c’est CAVOK. On aurait donc pu passer au dessus et éviter la machine à laver …
La fin du vol est assez simple puisque bien connu. A TW on prend direct sur Nogaro ou l’on laissera l’avion pour que le GSAC l’inspecte. Laetitia ne travaille pas aujourd’hui à Pyrénées…
A l’approche de Nogaro quelques stratus en fin de dissolution sont la, ca nous permet de descendre pour voir le Gers ! Vent arrière 14, base et finale … 3h50 de vol soit 8hdv depuis Naples !
On attend 30 min que le bus de Biarritz (le HR) vient nous prendre et on arrive à Biarritz avec une arrivée rapide d’anthologie !
Au final ce fut une navigation très intéressante, au milieu du monde pro et privé dans un avion neuf (c’est toujours agréable) et dans des contrées encore inconnues.
Superbe promenade et superbe expérience !
Félicitation d’avoir pris le temps de nous raconter tout cela.
Beau récit Antoine… Merci de l’avoir partagé… Ca a du être un beau trip…
Amic’, Ugo.
Super récit Antoine, merci de nous le faire partager
Joli.Merci de faire partager ton vol.