On va un peu quitter le ciel pour quelque chose d’un peu plus humide : un peu de voile. Je suis dans l’archipel de Glénan les deux dernières semaines d’aout. La dernière semaine j’encadre un stage « Spinnaker » sur Hobie Cat 16 (HC16).
Le HC16 est un catamaran dit de sport. Il mesure 16 pieds (env 5.5m). Avec près de 20 m² de voilure au près et 35 avec le spi pour 145 kg sans l’équipage ca en fait un bateau puissant.
Dès 15 kts de vents ça devient sympa (8-9 kts en solo) et à partir de 25 on commence à le trouver franchement surpuissant (tout du moins me concernant, avec une personne de mon poids).
Pour suivre tout ce qui suit, téléchargez la carte du plan d’eau annotée : ICI. (1,4 MB) et de zoomer…
Aujourd’hui on se réveille et y’a entre 22 et 25 kts à l’anémomètre. Il fait grand beau, la journée idéale. L’eau est comme d’hab à 16°C… Le décor est planté.
On doit aller à 4 bateaux à l’ile aux Moutons. Ca ne fait pas loin, surtout aux vitesses auxquelles on navigue (entre 8 et 15 kts en gros) mais ca nous change du lagon.
Pour remonter notre niveau de sécurité, l’Espadon (un bateau à moteur puissant de l’association) nous suit. Il est conduit par Yves (vice-président de l’association et un de mes formateurs pour devenir moniteur).
Comme on prévoit un pic-nic, il faut préparer la tambouille et autonomie oblige, on prend tout avec nous sur le bateau. On a donc un gros bidon étanche ficelé à l’avant. La route prévu est au près / bon plein et donc ce n’est pas trop gênant de l’avoir (avec le ris ca aurait été impossible car la bôme aurait gêné).
Comme je n’ai qu’un seul stagiaire dans mon stage, on se mélange au stage « Must » et ca fait 4 catas. Nous partons un peu plus tard de Drenec. Le vent est un peu tombé (18 – 22 kts) et on part GV haute. Le rendez vous avec les autres catas est à Guiriden. C’est le trajet en en rouge. Le coeff approche les 100 et on est à marée basse. Le départ est assez long dans une eau profonde de 20 à 80 cm … On s’échoue deux fois (marqué 1 sur la carte), mais suffit de descendre du cata et de le pousser sur quelques mètres.
On retrouve les autres bateaux, le dernier est en train de larguer son ris, Yves arrive en Espadon. On regarde vite fait la route : on sort du lagon par les Pierres Noires, puis nord de Rocher Leuriou et des Grands Pourceaux puis on contourne les Moutons par le nord pour prendre la plage de l’est.
Y’a toujours un peu d’air … On quitte Guiriden (pour ceux qui suivent encore sur la carte, c’est le trajet en bleu), puis on sort du lagon (non sans avoir essayé de passer entre deux cailloux ou la hauteur d’eau laissé trop à désirer, pour que je dise ca cela devait affleurer, marqué 2 sur la carte). Puis on trace droit sur Rocher Leuriou. On est bon plein, avec une petite vingtaine de nœuds, un petit mètre de vague. C’est super ! Mouillé à souhait, on trace ! A proximité de la cardinale je vois les cailloux et juste avant de virer, Yves me dit qu’il faudrait virer (par VHF). C’est le point d’interrogation marqué 3 sur la carte. Comme il n’y a pas encore de pilote automatique sur le cata et que le stick est trop court pour le donner à mon équipier (et oui, je barrais) ce n’était pas facile de répondre rapidement … Rentrée du trap, changement de barreur, réponse VHF et on vire ! Quelques bord proche de la cardinale et on fait route sur l’ile aux Moutons. A fur et à mesure qu’on s’approche on abbat et ca commence à devenir franchement humide. Le poids du bidon commence à nous gêner d’être à l’avant. Une fois proche de la cote nord, on se met en attente et au bout de 5 minutes, le second cata arrive. Vu la position du dernier, on se fait un petit bord pour le rejoindre puis on revient vers la cote nord des Moutons. On découvre ensuite la « plage » ou l’on doit beacher. L’arrivée est sympa : en marche arrière dans une anse avec des cailloux des deux cotés. Qui a dit que le cata était un sport de brute … Il a fallu un peu réfléchir…
Arrivée des trois autres catas et on les remontent. Avec le dernier je vais chercher Yves qui est au coffre au milieu de l’anse (oui y’avais un gros coffre en obstacle au milieu dans notre marche arrière). Puis on cherche un endroit ou manger. Après quelques hésitations, juste sous le phare a l’air d’être un bon endroit. On transporte le gros bidon étanche jusque la bas …
L’ile est presque déserte. Il n’y a que 3 ou 4 personnes qui comme nous mange à l’abri du vent. C’est la première fois que je vais aux Moutons. L’archipel est bien plus escarpé que celui des Glénans…
La mer monte et il faut rentrer pour que les bateaux ne partent pas sans nous (heureusement qu’ils étaient vent arrière …). Le haut de la petite plage est bientôt immergé et l’ile des Moutons se divise. Manipe inverse pour poser Yves sur l’Espadon. Par contre on galère un peu à lui donner notre gros bidon étanche (l’avoir au près ca va, mais le retour au portant un poids sur l’avant ce n’est pas super quand y’a 20 kts, y’a une limite à l’autonomie quand on a un bateau de « servitude » …).
Retour donc au portant (trajet vert sur la carte) dans 20/25 kts, un bon mètre de vague. Si l’aller était rapide, le retour est donc expéditif… Afin de ne pas partir sur Belle Ile, on abat beaucoup et donc ce ne sera que du simple trap. Derrière ca dessale pas mal… Au nord de Guiriden (c’est vague …), on rompt l’escadre et on balance le spi ! Y’a quand même un peu d’air et mon stagiaire apprend pas mal. Moi j’apprends à bien tomber dans l’eau en soleil 🙂 C’est tout une technique que de ne pas s’abimer quelques chose et c’est bien cette après midi la que j’ai appris (Louis, si tu lis : merci). Bon on a du que partir 3 ou 4 fois à l’eau (ce sont les croix marqués 4 sur la carte). Je dois être responsable d’un soleil …
On rentre tôt sur Drenec (notre base) car la journée est bien loin d’être finie. Avec le groupe de planche on part bivouaquer sur Castel Braz.
Castel Braz c’est un … cailloux. Y’a un peu de verdure en haut cependant. Mon stagiaire va quand même faire un peu de planche histoire d’être sur de pouvoir aller jusque la bas. Je ne veux pas non plus plomber le groupe de Léo (le moniteur des planchous). Moi aussi je monte sur une planche histoire de me dire que je sais encore en faire (ca devait faire une année ou deux …).
La préparation d’un bivouac, c’est pas celle d’un pic nic. Et puis on est quand même 10 à partir en totale autonomie (on verra que ce n’a pas été totalement le cas…). Il faut donc manger (important), dormir (très important) et boire (super important !). Pour cela, le communisme étant un courant « has been », on ne mutualise pas les poids. On regroupe tout ! On fabrique donc un radeau : deux planches à voile bien arrimé ou on enlève les dérives et on pose dessus glacières, bidon étanche et sac poubelle… Bilan de masse : 250 / 300 kg. Centrage : arrière (pour les pilotes qui me lisent). Préposé au remorquage du radeau : heuuuu bien c’est moi. Alors heureusement (ou pas), y’a encore entre 20 et 25 kts de vent. Décision : GO.
Le trajet est celui de couleur violet. La mise à l’eau du radeau est déjà tout un sport… Descendre de la cale, puis l’arrimer à ma planche puis partir. J’ouvre l’escadre et je prends plein ouest. Première constatation : heureusement qu’il y a le harnais. Je n’ai pas assez de vitesse (ou les straps ne sont pas assez avancé) pour être dedans mais je ne glisse pas trop. Deuxième évidence : ca dérive. Le vent n’a pas vraiment bougé (donc nord-est), et je suis presque aux prés serré (avec ma dérive descendu) pour être en route directe sur Castel Braz (aux cailloux d’avant près, mais j’y reviendrais). Je dépasse Drenec et arrive sous le vent de l’estran de St Nic (si vous avez bien suivi la mer descend, avec un bon coeff) et toujours personne derrière… Enfin avec la bouffe que j’ai, je peux me faire une bonne soirée et je continue. Ce n’est qu’arrivé au Broch (ou je m’octroie une pause photo, marque 5 sur la carte) […]
[…] que le reste de « l’escadre » arrive. Par contre, dans 20/25 kts de vents au petit largue, ils tracent. Les meilleurs sont foot-strap harnais et me dépasse très rapidement. Un moniteur de planche aide le pauvre Léo qui galère un peu à garder tout le monde sur la bonne trajectoire. C’est vrai que dehors, un petit clapot de 60 cm avec une houle courte d’un petit mètre peut surprendre ceux qui sont habité au lac (le lagon …). Venez au Pays Basque !
Puis les effets pervers des cailloux arrivent. A l’approche de Castel Braz, me disant que le plus dur était fait, le vent refuse vraiment entre deux cailloux.
Moi qui abattais exprès avant me voila obligé à tirer un bord (qui a pu me donné le monitorat (cf. quelques lignes avant)). Le virement de bord avec 300 kg derrière dans de la mer ce n’est pas si sympa… Faut tellement abattre pour prendre un peu de vitesse qu’on perd tout. Je finis par m’accrocher aux cailloux sud de Castel Braz et on vient m’aider à amener le radeau sur notre lieu d’atterrissage : rocher plus ou moins plan et glissant. Que du bonheur. Mais je ne suis pas le dernier à arriver ! Ceux qui n’ont pas été assez stratégiques sont maintenant loin sous le vent et ce n’est pas gagné pour eux … Heureusement, Olivier arrive en sécu et ramène toutes les brebis dans notre abri.
Il faut maintenant monter le radeau. Avec quelques mètres de marnages, pas question de laisser tout cela en bas. Planches, voiles, radeau, tout doit être monté. Ca glisse, le soleil se couche, il commence à faire froid, et on est crevé ! Mais on fait ca dans la bonne humeur (en pensant au ti-punch (en fait c’était un planteur !)).
On installe le tipi : ce sera notre abri pour dormir ce soir. Sur le radeau, il y avait les couvertures pour un peu mieux dormir. On installe tout cela, et c’est l’heure de la photo de groupe et du couché de soleil :
Puis, repas – apéro – dessert – collation. Une soirée aux Glénans, sur Castel Braz, avec de quoi manger et boire c’est GEANT ! On se couche tout de même tot, car on est tous bien crevé… Avec 4 soleils, 2 fois tombés de ma planche, 4 virements de bord, et une arrivée de folie sur Castel Braz je suis vanné.
Levé le matin vers 8h30 (ouech, trop bien, on s’est levé 30 min plus tard que les autres sur l’ile !). On compte nos côtes et voir si elles ne sont pas cassé (dormir sur les cailloux ce n’est pas super, surtout quand l’alcool ne fait plus effet). La météo n’a pas trop changé : beau temps, 20 kts du nord… On commence par une visite de Castel Braz.
Puis manip inverse : combi, descente des planches, voiles, et du radeau et mise à l’eau de tout ca. Le départ est super soft (mais pas si simple tout de même) par rapport à l’arrivée de la vieille. Cap entre Drenec et St Nicolas (trajet jaune-orangé). Mais la, dès le début je le sais, je n’irai pas en une seule fois à la maison. Ca dérive trop. Le vent doit être un peu plus nord est que ce que je pensais.
Le retour se fait sans trop de problème. Mais arrivé à l’ouest de Drenec, je me mets à tirer des bords pour pouvoir rentrer… Et la je galère pas mal… Un, deux, trois, quatre, cinq virement. Oui je gagne du terrain, mais à quel prix. Et la deuxième entorse à l’autonomie, le chef d’ile vient me prendre le radeau. C’est presque orgasmique (désolé …). Je bord, ca accélère, ca plane, straps … Trop bon ! Quelques bord puis je rentre manger (et oui c’est déjà l’heure).
Léo a fièrement mis le R (de retour) sur le livre de quart et après le repas une autre après midi de folie nous attend en Hobie Cat 16 Spi !
Je finis d’écrire ce récit 1 an et demi après mais les souvenirs restent intacts. Vraiment, y’a des journées qu’on n’oublie pas aux Glénans 🙂 Merci aux responsables qui nous permettent encore tout cela dans un monde ou le mot liberté ne veut plus dire grand-chose à cause des responsabilités des uns et la peur des autres… La fin est un peu moralisateur … Désolé …
Et pour finir, un peu de pub :
Site web de l’association des Glénans : http://www.glenans.asso.fr/
Site web de TribuGlénans (forum entre passionné de la voile (aux Glénans)) : http://www.tribuglenans.org/
Mon site web “Voile – Glénans) : http://glenans.arogues.org
Salut Antoine, c’est Léo
je viens de croiser par hasard ton récit… merci de nous remémorer ces instants magiques.
Depuis, j’ai du refaire 1 ou 2 bivouacs sur Castel Braz… avec un peu moins de vent, mais toujours autant de plaisir.
Vive les Glénans et l’avion
A bientôt sur les îles
PS : j’ai mon PPL depuis 1 an et demi… et 160hdv
Léo – Moniteur Pilote
Salut Léo,
Super ! Moi j’arrive à 420hdv avec surtout de la voltige maintenant… (et du vol de nuit).
A bientôt sur les iles (ou sur Grenoble).
Antoine